Date : Fri, 19 Mar 2004 07:39
De : Ze Bath Leurre
Objet : prêt-à-rimer - LAMARTINE
l'original :
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L'AUTOMNE
Salut, bois couronnés d'un reste de verdure!
Feuillages jaunissants sur les gazons épars!
Salut, derniers beaux jours! le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards.
Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire;
J'aime à revoir encor, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois.
Oui, dans ces jours d'automne où la nature expire
A ses regards voilés je trouve plus d'attraits;
C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire
Des lèvres que la mort va fermer pour jamais.
Ainsi, prêt à quitter l'horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l'espoir évanoui,
Je me retourne encor, et d'un regard d'envie
Je contemple ses biens dont je n'ai pas joui.
Terre, soleil, vallons, belle et douce nature,
Je vous dois une larme au bord de mon tombeau!
L'air est si parfumé! la lumière est si pure!
Aux regards d'un mourant le soleil est si beau!
Je voudrais maintenant vider jusqu'à la lie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel:
Au fond de cette coupe où je buvais la vie,
Peut-être restait-il une goutte de miel!
Peut-être l'avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu!
Peut-être, dans la foule, une âme que j'ignore
Aurait compris mon âme, et m'aurait répondu!...
La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire;
A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux:
Moi, je meurs; et mon âme, au moment qu'elle expire,
S'exhale comme un son triste et mélodieux.
( Alphonse de Lamartine )
le prêt-à-rimer :
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Il n'a rien de Tanguy, mais tout de Laverdure *;
vu son pif, c'est sûr qu'il ne connaît pas l'Hépar ;
c'est un grand escogriff', un(e) forc(e) de la nature :
quand tu croises ses yeux, tu détourn's le regard.
Tous les matins il entre au bar et, solitaire,
il salue le patron d'un geste, à chaque fois.
Puis il s'asseoit dans l'ombr', jamais dans la lumière,
et consciencieusement, là, jusqu'au soir il boit.
Un jour y a un quidam -- du genr' qui lit Shak'speare --
qui le reluque en biais. Lui, se lèv', boit d'un trait
l' fond d' son verre et s'approch'. Le mec tente un sourire,
arborant des ratich's qu'il n' reverra jamais.
C'est la fill' du patron qui lui sauve la vie :
à voir voler les chicots elle s'évanouit.
Il arrête de cogner, car il n'a pas envie
d' décevoir cell' pour qui tout's les nuits, seul, il jouit.
L'amour qu'il a pour ell' lui sembl' contre nature.
Son secret, il préfèr' l'emporter au tombeau
plutôt que de risquer d' froisser cett' beauté pure,
elle si jeune et bell', lui si vieux et pas beau !
" Je boirai mon ballon de côt's jusqu'hallali,
pens'-t-il en digne fan des Chevaliers du Fiel **.
" Et, le coeur aux abois, je quitterai la vie
" oubliant les taïauts *** ! Seule la voix de miel
" de la fille du bar me remuera encore ! "
Déjà saoûl il ne voit pas le regard perdu
de la belle. Ah, quel con ! Il est sûr qu'ell' l'ignore !
Pourtant... un seul coup d'oeil... elle aurait répondu !
Chaqu' matin, quand elle dit : "Bonjour, monsieur Zéphir ! "
tu n'entends rien, poivrot ? Ecoute, nom de dieu !
Lorsqu'elle te regard(e), chaque mot qu'elle expire
est un chant de sirène et d'amour mélodieux !
( Elle est foncedé la Martine )
* Tanguy et Laverdure sont les héros des "Chevaliers du Ciel", célèbre série
télévisée des années 1970. Laverdure était incarné par l'acteur Christian
Marin.
** Les "Chevaliers du Fiel" étaient un duo comique en vogue dans les cabarets
de la fin du XXè siècle.
*** à ne pas confondre avec Tata Yoyo... qu'en avait sous son grand chapeau !
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