9 octobre 2005
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B comme belette
Ce charmant animal carnivore subit les dégâts collatéraux consécutifs à un nom de baptême donné trop rapidement, engendrant de facto bon nombre de confusions phonétiques. (A croire que lors de la distribution des noms, il dut y avoir des dysfonctionnements, dont la responsabilité relève certainement du recrutement abusif de travailleurs intérimaires sous payés.)
Bizarrement ces confusions se sont toutes exercées au détriment de notre gentil mammifère : à l’évidence, les lois de Murphy se sont acharnées contre cet animal.
Illustrons le propos. Initialement, la Comtesse de Beaumont avait intitulé son conte « La Belle et la Belette ». Un abruti de typographe presbyte commit une énorme bévue dont l’importance ne vous aura pas échappé. Et pourtant, imaginez un instant Jean Marais maquillé en belette en train de draguer effrontément Josette Day ! La scène aurait eu un peu plus de gueule qu’avec ce misérable maquillage façon chat de gouttière, digne d’une kermesse de fin d’année dans un institut médico-éducatif ! Le typographe avait au moins une excuse, mais Cocteau, franchement, il devait être complètement murgé. D’ailleurs, ne dit-on pas : « Un cocktail, des Cocteau » ? Encore une preuve accablante à verser au dossier des méfaits de l’alcoolisme. Oublions au passage le révisionnisme de ce metteur en scène de théâtre qui monta « L’Abeille et l’Ablette ». Toutes les représentations de sa pièce durent s’arrêter au bout de cinq minutes, vu que l’ablette se jetait goulûment sur l’abeille pour la dévorer. Comme quoi, la justice immanente n’est pas un vain mot : constatation rassurante qui me permet de dormir sereinement sur mes deux oreillers.
Mais je vois que le temps qui m’était imparti touche à sa fin ; je n’aurai donc pas le loisir de vous parler de la « poire belette », ni de cette fable (La Chauve-souris et les deux belettes), dans laquelle La Fontaine attribue implicitement un Q.I. de moule marinière à ce noble quadrupède. Ce n’est que partie remise, Monsieur de La Fontaine : au fil de ces chroniques, nos chemins se croiseront derechef et j’en profiterai pour dénoncer votre imposture de zoophile doublée d’un pédophile, puisque vous vous attaquiez souvent aux jeunes animaux sans défense, fussent-ils des pachydermes. La rime de façade qui unit les mots « zoophile » et « pédophile » ne doit pas cacher les bassesses d’un prétendu poète qui se nourrissait sans vergogne de glauques turpitudes à la mamelle de la lubricité.
Michel Tournon