[Jai écrit l'article ci-dessous en réponse à un "ami" sur FaceBook qui se vantait d'aduler François Morel. Depuis, ledit "ami" nommé Olivier Chauzu, m'a viré de ses contacts, alors que c'était lui qui était venu me chercher. Comme quoi, il ne fait pas bon le contredire. Sur FB, il s'est créé un troupeau de courtisans qui doivent penser comme le Prince, sinon gare au coup de balai. Il se la pète grave, pépère ; bien content de ne plus être "ami" de ce fat, limite foutriquet.]
De nos jours, François Morel, c’est surtout le chroniqueur de France Inter, tous les vendredis matin à 8 h 55. Pour bien apprécier ces chroniques, il est nécessaire d’en connaître la genèse et en étudier l’historique.
Au début était Guy Carlier que tous les plateaux s’arrachaient parce qu’il osait ridiculiser des personnages publics. Foutage de gueule gentillet garanti mais pas haineux ni moralisateur. Vers 2008, vint Guillon qui fut lourdé à cause de sa chro nique concernant DSK, puis Didier Porte qui, lui aussi dut la prendre pour avoir répété à plusieurs reprises qu’il sodomisait Sarkozy, prouvant par là la finesse de son esprit et le raffinement de ses pratiques sexuelles. Gerald Dahan fit une courte apparition jusqu’au jour ou Val, de grâce, le congédia. Selon l’ « humoriste », c’était à cause de sa dernière chronique dans laquelle il avait dézingué Alliot-Marie présente dans le studio. En fait, c’était pour cause de médiocrité, ce qui est nettement moins glamour. Mais le précédent existait : un humoriste ne peut se faire lourder que pour raisons politiques, surtout pas pour manque de talent…
De ces passages successifs, une fonction naquit : celle de l’humoriste qui, à défaut de talent ou d’esprit, peut apostropher, insulter, diffamer un invité en se prévalant de l’immunité que lui confére sa carte de comique. À défaut de faire rire, le chroniqueur humoristique devint inquisiteur, moraliste, éditorialiste politique haineux, dont le buzz est amplifié par le Net, notamment grâce aux vidéos. Antoine Fouquier-Tinville, sors de ce corps !
François Morel me faisait bien marrer lorsqu’il aboyait avec ses potes les Deschiens sur Canal + il y a quelques années. Et lorsqu’il jouait avec les mêmes dans les pièces des Deschamps/Makeïeff, mes zygomatiques furent également de la partie. Morel apparaît aussi comme 18e couteau (au fond du tiroir, à gauche) dans plusieurs films. Je le trouve quelconque, ce qui dans mon échelle de valeur est proche de l’encéphalogramme plat, mais quand un couteau joue comme un manche, c’est plutôt cohérent (je sais, c’est facile).
Donc, chronique de François Morel tous les vendredis matin. Initialement, lesdites chroniques étaient plaisantes, propres sur elles, un tantinet poétiques, pas vraiment agressives mais plutôt quelconques dès qu’on les comparaît à celles de Sofia Aram qui officiait également sur France Inter, un autre jour de la semaine. Elle avait repris le flambeau des dézingueurs professionnels suscités et qui l’avaient précédée, mais avec plus de délicatesse, en enveloppant le bonbon pour qu’il soit moins acidulé. De fait, parmi les cinq chroniqueurs journaliers, elle sortait du lot et faisait ombrage aux quatre autres en particulier au petit poète du vendredi matin.
On devine aisément ce qui a dû se passer dans la tête de François : que dois-je faire pour me faire une place au soleil ? Les solutions les plus simples étant les plus sûres, François se dit in petto et en français : je vais faire comme mes prédécesseurs ! Recette : mettre dans un cul de poule, Marine Le Pen, Christine Boutin, le Mariage pour Tous, un bon verre de Romes, un filet d’insultes, des propos contre la corrida, une énorme giclée de point Godwin, beaucoup d’indignation, d’émotion et de compassion (surtout en cas de racisme), un soupçon de morale, bien fouetter et hop, amener à ébullition pendant cinq minutes, de préférence entre 8 h 55 et 9 h, le vendredi.
François est très certainement intelligent. Il a dû se dire : « Concocter une mixture avec ce type d’ingrédients n’est pas vraiment nouveau, pour tout dire pas drôle du tout ni très courageux encore moins original pour l’artiste de gauche que je suis. Toutefois mes chroniques seront fatalement vertueuses et la vertu n’offre pas de prises aux critiques, c’est tout bénéf. Et surtout, il y a un public pour ça : le prêt-à-penser, certains adorent, c’est rassurant ! Pourquoi les en priver ? Je leur dis ce qu’ils veulent entendre… Je serais vraiment débile de m’abstenir, d’autant qu’en accommodant n’importe quel fait divers, politique ou petite phrase issue d’un « people », bref, n’importe quel élément issu de l’actualité avec cette préparation culinaire, je suis certain de produire une chronique à succès!
Et c’est ainsi que Morel devint le pape François de la bien-pensance, cinq minutes par semaine, sur France Inter. Et beaucoup plus sur Youtube et les réseaux sociaux.
Michel Tournon