28 janvier 2006
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R comme Rat
« L’intelligence, c’est prévoir celle de l’autre ». L’Homme ferait bien de suivre à la lettre cet apophtegme s’il ne veut pas que la suprématie des rats le relègue un jour au rang de l’amibe trisomique. Je me réfère ici, bien sûr, à l’amibe Idasse, reconnaissable facilement à son uniforme. La progression du rat est d’autant plus sournoise qu’il adopte la stratégie du caméléon pour mieux tromper son ennemi de toujours ; pour preuve le rat daim (économe de ses gestes) et le rat caille, dont la variété, sarkozium karcheri est la plus dangereuse.
Autre signe de cette infâme duplicité : le rat dit noir alors que le rat bout gris, preuve s’il en fallait de l’ignominie sans borne des êtres scélérats que sont les rats.
La femelle du rat se nomme la rate. Aussi sournoise que le mâle, puisque son nom ne prend qu’un « t », afin de mieux tromper son monde. Il faut tout de même reconnaître que le mot « ratte », variété de pomme de terre, existe déjà. Et alors là, je pose la question : pourquoi a-t-elle préféré être l’homonyme d’un viscère (rate) et pas celui d’un légume (ratte) ? Pourtant, le point commun entre la femelle du rat et cette pomme de terre, c’est que toutes les deux se font sauter ! Le rat est un chaud lapin, qui vit de rapine, au beau milieu des sapins avec sa copine. Il y a peut-être matière à contrepet avec ces alexandrins, mais je ne l’ai pas trouvé… À ce propos, comment fait-on en langage des signes pour raconter une contrepèterie ? Ne risque-t-on pas de se luxer une articulation ? C’est d’ailleurs curieux un langage non articulé qui nécessite plusieurs articulations pour s’exprimer.
« À bon chat, bon rat », dit la sagesse populaire. N’ayant jamais mangé une de ces viandes, je me garderai de porter un avis validant cette expression. D’ailleurs, je suis persuadé que la plupart des proverbes perdurent plus par leurs assonances et autres allitérations que par la profondeur de leur bon sens. Par exemple : « Qui vivra verrat » ; ça sonne bien à l’oreille, mais que vient donc faire un cochon dans cette histoire ? Ou encore : « Aide-toi, le ciel tes draps » n’a pas plus de sens que « Aide-toi, ton polochon ».
On voit par là que le bon sens n’est pas unique.
Michel Tournon
Published by Michel Tournon
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Les Clés du Bestiaire par Michel