Voici un poème que Victor Hugo a écrit un 18 avril :
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TOUTE LA LYRE
LES SEPT CORDES
IV - L'ART
- XVI -
Doux poëtes, chantez ! Dans vos nids, sous la feuille,
Même au déclin des ans,
L'aube vous rit ; soyez les seuls dont l'amour veuille
Dorer les cheveux blancs !
Le poëte est un chant qui vole à nos oreilles ;
Il vit dans un rayon ;
Enfant, il est Platon baisé par les abeilles,
Et, vieux, Anacréon.
Ô poëtes ! vivez, aimez, battez de l'aile,
Radieux et cachés !
Le bonheur vous convie à sa fête éternelle !
Mais si vous approchez
Des révolutions énormes et sévères,
Fier chaos, gouffre obscur
Où les sommets ont tous des formes de calvaires,
Renoncez à l'azur !
Renoncez à l'amour, renoncez à la fête !
Faites-vous de grands coeurs
Qui, dans plus de souffrance et dans plus de tempête,
Se sentent plus vainqueurs.
Le genre humain, depuis six mille ans à la chaîne,
Levant soudain le front,
S'est enfin révolté contre la vieille peine,
Contre le vieil affront ;
Il faut être puissant et grave quand on entre
Dans ces rébellions.
Soyez oiseaux ; alors ne volez pas dans l'antre ;
Ou devenez lions.
Victor Hugo - 18 avril 1854