27 juillet 2006
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Voici un poème que Victor Hugo a écrit un 27 juillet :
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TOUTE LA LYRE
LES SEPT CORDES - III
- LVII -
Souffrance, es-tu la loi du monde ?
L'homme vient triste et s'en va nu ;
Il naît débile et meurt immonde ;
Es-tu le fond de l'inconnu ?
Les grêles, les foudres, les trombes ;
Les marteaux meurtrissant les clous ;
Le grain dans le bec des colombes,
L'agneau dans la gueule des loups ;
Le tigre ayant l'horreur secrète
De sa propre férocité ;
Le lion, fauve anachorète
Qui hurle dans l'immensité ;
L'enfant qui meurt, âme qui sombre ;
Le lys qu'on fauche, à peine éclos ;
Les marins qu'engloutit dans l'ombre
La bave sinistre des flots ;
Partout les embûches funèbres,
Le glaive, la griffe, la dent ;
Des yeux fixes dans les ténèbres ;
Le crime guettant et rôdant ;
L'abeille que chasse la guêpe ;
La guerre battant du tambour ;
Un horizon voilé d'un crêpe,
Où croît l'ombre, où décroît l'amour ;
Les discordes qui se répandent ;
Caïn, Nemrod, Néron, Macbeth ;
Tous les coeurs des hommes qui pendent
A la haine, ce grand gibet ;
Le doute qui sort de la tombe,
Et, du haut du ciel sans clarté,
Semble un soir éternel qui tombe
Sur la lugubre humanité ;
Toutes ces douleurs, est-ce l'ordre ?
L'air du sépulcre emplit les cieux,
Et sur l'abîme on voit se tordre,
La nuit, des bras mystérieux.
Et toutes ces choses farouches
Disent cette plainte à la fois,
Et de toutes ces sombres bouches
On entend sortir cette voix :
-- Dieu ! qu'a donc fait la créature,
Et pourquoi l'être est-il puni ? --
C'est le grand cri de la nature
Dans le grand deuil de l'infini.
Victor Hugo - 27 juillet 1854
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TOUTE LA LYRE
LES SEPT CORDES - III
- LVII -
Souffrance, es-tu la loi du monde ?
L'homme vient triste et s'en va nu ;
Il naît débile et meurt immonde ;
Es-tu le fond de l'inconnu ?
Les grêles, les foudres, les trombes ;
Les marteaux meurtrissant les clous ;
Le grain dans le bec des colombes,
L'agneau dans la gueule des loups ;
Le tigre ayant l'horreur secrète
De sa propre férocité ;
Le lion, fauve anachorète
Qui hurle dans l'immensité ;
L'enfant qui meurt, âme qui sombre ;
Le lys qu'on fauche, à peine éclos ;
Les marins qu'engloutit dans l'ombre
La bave sinistre des flots ;
Partout les embûches funèbres,
Le glaive, la griffe, la dent ;
Des yeux fixes dans les ténèbres ;
Le crime guettant et rôdant ;
L'abeille que chasse la guêpe ;
La guerre battant du tambour ;
Un horizon voilé d'un crêpe,
Où croît l'ombre, où décroît l'amour ;
Les discordes qui se répandent ;
Caïn, Nemrod, Néron, Macbeth ;
Tous les coeurs des hommes qui pendent
A la haine, ce grand gibet ;
Le doute qui sort de la tombe,
Et, du haut du ciel sans clarté,
Semble un soir éternel qui tombe
Sur la lugubre humanité ;
Toutes ces douleurs, est-ce l'ordre ?
L'air du sépulcre emplit les cieux,
Et sur l'abîme on voit se tordre,
La nuit, des bras mystérieux.
Et toutes ces choses farouches
Disent cette plainte à la fois,
Et de toutes ces sombres bouches
On entend sortir cette voix :
-- Dieu ! qu'a donc fait la créature,
Et pourquoi l'être est-il puni ? --
C'est le grand cri de la nature
Dans le grand deuil de l'infini.
Victor Hugo - 27 juillet 1854